Pierre de Ronsard

,poète de princes, prince de poètes"

La vie

II est né le 11 septembre 1524 dans les provinces de la Loire moyenne, au château de la Poissonière, en Vendômois. Jusqu'à ces 12 ans il est resté à la maison. Après, il a passé une demi-année au lycée de Navarre, connu par Rabelais. Ronsard appartenait à une famille noble: tout jeune, il est appelé à la cour pour s'y préparer un avenir militaire et diplomatique. Il sert successivement le premier fils du roi, puis Charles d'Orléans et enfin Madeleine de France qui après son mariage avec Jacques Stuart l'a emmené avec lui en Ecosse, où elle meurt bientôt. Il a ensuite accompagné en Allemagne son cousin Lazare de Baïf, humaniste feru de culture antique.

Le 21 avril 1541 Ronsard a fait la connaissance avec Cassandre Salviati - son premier grand amour, fille d'un riche banquier italien en France. Il l'a rencontré lors d'une fête de la Cour à Blois, alors qu'elle avait à peine 13 ans. Un peu plus tard il rencontre Marie Dupin, une très belle paysanne tourangelle de 15 ans.

En 1542 une longue maladie le laisse à demi sourd. Dès lors, il renonce à ses premières ambitions, pour se consacrer tout entier à la poésie. Lazare de Baïf l'accueille dans sa maison comme compagnon de son fils Antoine, et Ronsard y suit les leçons de Dorat, qu'il rejoint au collège de Coqueret. Il travaille avec acharnement et pénètre dans la littérature grecque et latine. Sa culture, plus étendue que celle de du Bellay, son autorité, son appétit de gloire, autant que son génie, l'ont imposé d'emblée comme le chef de la Pléiade.

En 1558 Ronsard devient le poète officiel, il remplissait ce rôle pendant tout le régne de Charles IX. Comme aumônier du roi, bientôt pourvu de bénéfices importants - en particulier des prieures de Saint-Cosme-lès-Tours et de Croixvals qui vont devenir ses résidences préférées, il a joué d'une faveur considérable. Pendant cette période, Ronsard, sans renoncer à chanter les plaisirs de la nature et les volages amours, doit souvent composer pour des fêtes royales, des pièces de commande, où manque l'inspiration. En même temps, il rêve de devenir le chantre des destins politiques et religieux de la France.

Vers 1576 Ronsard rencontre Hélène de Surgères, une demoiselle d'honneur de Catherine de Médicis. Sur la commande de Catherine de Médicis il commence à la chanter, mais après, comme l'homme de 52 ans, il tombe amoureux d'elle. C'était son dernier amour qui a illuminé sa maturité.

La mort de Charles IX fait perdre à Ronsard sa situation à la cour. Henri III avait son poète, Philippe Desportes. Malade, Ronsard se retire dans ses prieurés de Saint-Cosme et dans le Vendômois, où il continue à écrire. Dans ces poèmes est déjà souvent présente la pensée de la mort. Elle est exprimée parfois avec un réalisme brutal qui rend poignante et solennelle la leçon si souvent donnée autrefois. Ronsard meurt le 27 décembre 1585 à Saint-Cosme.

LES ODES (1550-1556)

Dès 1550, Ronsard publiait 4 livres d'Odes. Il imitait le plus grand poète lyrique grec, Pindare, et le plus grand poète lyrique latin, Horace. De 1553 à 1556, il publiait de nouvelles odes, les unes encore inspirées d'Horace, les autres imitées des poèmes faussement attribués au poète alexandrin Anacréon. Un certain nombre d'Odes, groupées avec d'autres pièces, figurent dans le recueil intitulé Le Bocage (1554).

Odes pindariques. Les odes imitées de Pindare sont pénibles à lire aujourd'hui, malgré le génie qu'elles révèlent. Ronsard avait l'ambition d'acclimater en France l'ode pindarique, écrite en l'honneur des athlètes vainqueurs aux grands jeux de la Grèce, mais le lyrisme grandiose du poète thébain sied mal à une inspiration tout officielle. En outre, la division en strophes, antistrophes et épodes n'a pas grand sens, dans des pièces qui n`étaient pas destinées à être chantées par un choeur évoluant selon cette division ternaire. Pourtant, quelques poèmes entraînent par l'éloquence, par les effets brillants du style, par le mouvement rapide et dansant du vers. Ronsard, dans cette erreur de jeunesse, prouvait dès l'abord qu'il possédait les qualités d'un très grand poète.

Odes horaciennes. Les odes imitées d'Horace satisfont davantage notre goût moderne. Elle
marquent les débuts de Ronsard dans la poésie légère. Ronsard se retrouvait chez son modèle
latin, dont il aimait l'imagination voluptueuse et riante. Les pièces de cette veine sont
inspirées souvent par des thèmes épicuriens, qui demeureront toujours chers à Ronsard: le
temps fuit, il faut jouir de la vie et profiter du plaisir qui passe.

Odes anacréontiques. Enfin les odes imitées de la tradition anacréontique, un peu mièvres à notre goût, peuvent encore nous plaire, comme elles ont plus au public du temps, par leur facilité et leur naturel.

La poésie amoureuse est une partie importante de la production d'un poète du XVIe siècle. Les textes sont rassemblés en recueils dédiés à telle ou telle dame bien identifiée, mail il faut compter aussi avec toutes les pièces isolées, poèmes de circonstance, amours fugitives, textes dans lesquels Ronsard prête sa plume à un grand seigneur amoureux. A côté de Cassandre, Marie et Hélène, autour desquelles s'organisent des recueils entiers, il y a d'autres noms: Astrée, Sinope, Genèvre,...

Les Amours de Ronsard se composent de 2 parties: le Premier Livre, inspiré par Cassandre Salviati, fille d'un grand seigneur florentin, et les Amours de Marie, consacrés à une simple paysanne des environs d'Anjou.LES AMOURS DE CASSANDRE (1552)

En 1552, Ronsard publie un recueil de sonnets amoureux dédiés à Cassandre. Mais il l'a chanté déjà dans les Odes. Ces sonnets, imités de Pétrarque et des poètes pétrarquisants, manquent de naturel et de simplicité. Ronsard s'efforce de surpasser par les raffinements de sa rhétorique son modèle italien, et de faire de sa Cassandre une Laure plus parfaite encore que celle de Pétrarque. Mais la thématique de ces 182 sonnets admirablement construits s'éloigne des plaintes classiques de l'amant martyr pour osciller entre deux pôles: rêverie sensuelle -les amours de Ronsard ne sont en rien platoniques - et réflexion sur l'immortalité poétique.

LES AMOURS DE MARIE (1555)

Ces petits poèmes renferment tout ce qu'il y a de lumineux sur la terre: la rose, la jeune fille, le printemps, les prairies. Leur grâce ne s'analyse pas: comme un instrument touché par des mains de génie, la langue prend une saveur et une douceur nouvelles. En 1578, Ronsard compose un groupe de sonnets Sur la mort de Marie. On ne sait pas, si c'est Marie de Clèves, maîtresse de Henri III, ou la même Marie, jeune paysanne célébrée dans les Amours en 1555, ou il a voulu mêler les deux.

LES SONNETS POUR HELENE (1578)

Tout à la fin de sa vie, Ronsard revient à la poésie amoureuse. Cette fois, il s'adresse à Hélène de Surgères, fille d`honneur de Catherine de Médicis. Ici Ronsard raconte ses amours pour mieux illustrer son activité poétique: l'amour est au coeur de sa poésie, mais en même temps, la poésie est un argument du discours poétique. Le motif épicurien du carpe diem (,,cueille le jour") est cyniquement renforcé par un chantage à la vieillesse qui ne se conforme guère au code du "parfait amour". Si la mythologie vient prêter son lustre à une figure de femme - Hélène de Surgères est aussi Hélène de Troie - il n'est plus question de subtilités pétrarquistes. L'écriture poétique se teinte d'humour, et les images se mèlent au discours familier.

LES HYMNES (1555-1556)

Désormais réputé à la cour, Ronsard cherche à s'imposer par une oeuvre d'une haute inspiration, où puisse se déployer sa puissance oratoire. Il compose alors les Hymnes. Elles marquent le retour aux grands sujets abordés dans les odes pindariques. Les Hymnes de Ronsard s'inspirent des hymnes homériques, de ceux de Théocrite et de Callimaque. Le poète développe des thèmes généraux, pour orner ses grandes compositions, il recourt à la mythologie. Sujets et ornements donnent une certaine froideur à ces poèmes, mais il y a pourtant de réelles beautés dans les Hymnes. Évitant l'erreur qu'il avait commise dans les Odes pindariques, Ronsard a choisi cette fois le décasyllabe et plus souvent l'alexandrin, qui convient à la gravité héroïque.

LES DISCOURS ( 1560-1563)

C'est une oeuvre éloquente et hautement inspirée. Renonçant à imiter les anciens, le poète, au début des guerres de religion, prend nettement parti: il met son génie au service de son roi et de la foi catholique.

LA FRANCIADE (1574)

Le poème épique de la Franciade est sans doute l'oeuvre dans laquelle Ronsard avait mis ses plus belles espérances, mais elle était un échec. A l'exemple de Virgile pour Rome, il entreprenait de conter la fondation de Paris par un descendant des Troyens, Francus. Une légende aussi contestable ne pouvait guère éveiller d'enthousiasme patriotique. En outre, le poète empruntait son merveilleux à une religion morte. Il prodiguait les comparaisons empruntées, les périphrases froides, les tableaux traditionnels de festins, de tempêtes, de songes. Comme dans les Odes pindariques, il était victime d'une imitation trop servile. Enfin, le mètre adopté, le décasyllabe, n'avait pas l'étoffe nécessaire pour soutenir le mouvement
d'une épopée en langue moderne.